Sur le côté de la fenêtre, derrière le volet fermé d'une chambre inutilisée, je découvre, un matin, un petit nid de papier gris constitué de quelques dizaines d'alvéoles hexagonales. La bâtisseuse s'affaire sur l'ouvrage léger suspendu au mur par un fin pédoncule.
Taille fine, corps jaune rayé de noir, je reconnais l'insecte immédiatement: une guêpe poliste.
La poliste fabrique un nid en papier de taille réduite. Contrairement aux autres vespidés, ce nid n'est pas protégé par une enveloppe en papier. Il est fixé à son support (branche, mur....)par un fin pédoncule.
Les guêpes polistes se rencontrent très couramment sur les fleurs d'ombellifères dont elles récoltent le nectar et le pollen.
On les distingue facilement de leurs cousines vespidés (guêpe commune, guêpe germanique...) : l'allure générale, la couleur et la taille sont semblables, certes, mais en regardant de plus près, on remarque que la tête porte des antennes partiellement ou totalement orangées ou jaunes (celles des autres vespidés sont entièrement noires). L'abdomen dont le premier segment est arrondi chez les polistes est plat chez les autres guêpes. En vol, on remarque leurs longues pattes postérieures qui semblent flotter derrière elles...
Les entomologistes ont déterminé plus de 300 espèces de polistes à travers le monde pas toujours très faciles à distinguer: Polistes gallicus et Polistes dominula semblent les plus courantes en France. N'étant pas spécialiste je ne m'engagerai donc pas trop sur la détermination au delà du genre. (Pour les pointilleux, je propose quelques documents et sources sur ce sujet en fin d'article.)
La poliste confectionne du papier avec des fibres de bois longuement malaxé avec de la salive.
Chez vous aussi des polistes ont bâti leur nid à proximité de votre habitation? Pas de panique. Inutile d'appeler les pompiers, l'élégante n'est pas agressive. Même si elle est dotée d'un dard avec lequel elle peut infliger des piqûres douloureuses, elle l'utilise rarement contre un agresseur. Garder une distance de sécurité de 30 centimètres et s'approcher en douceur évitera tout incident désagréable. Quant à son nid, il ne convient pas non plus de s'affoler: petit, il restera petit. Les colonies ne dépassent guère, pour les plus importantes, une cinquantaine d'individus, tous pacifiques, occupés à butiner ou chasser les insectes, plus rarement à goûter les fruits mûrs tombés à terre .
La reine poliste, femelle féconde (au contraire des ouvrières qui sont des femelles stériles) , construit au printemps un nid aérien et assure seule la construction du nid et les soins apportés au couvain. Elle peut être assistée par d'autres reines qui perdront leur fécondité et qui, progressivement, n'assureront plus qu'un rôle d'ouvrière. Les œufs pondus par ces auxiliaires sont détruits par la "vraie" reine.
La reine poliste dépose au fond des alvéoles un œuf dont il sortira une larve qui, en fin de croissance, fabriquera un opercule pour entrer en nymphose et se transformer en insecte complet ou imago.
Et si malgré cela vous avez encore une appréhension, n'oubliez pas que tous les insectes porte-sabre ont aussi leurs ennemis. Quand l'occasion s'en présente, les araignées comme misumena vatia en font leur repas.
Mais peut-être vous demandez vous comment faire la différence entre le nid de la poliste inoffensive de celui des guêpes communes, nettement plus agressives et potentiellement dangereuses. Rien de bien compliqué: le nid de la poliste, toujours aérien, est constitué de loges sans enveloppe protectrice et on peut le trouver dans les buissons, accroché sur un mur ou un élément des constructions humaines.
Les guêpes communes préfèrent vivre cachées. Elles s'installent souvent dans le sol, en particulier dans des anciens terriers de rongeurs. Quand elles investissent les habitations humaines, elles chercheront plutôt l'intérieur des cloisons ou un lieu dissimulé. Les loges sont enveloppées dans une paroi de papier et constituent un nid parfois volumineux abritant une colonie nombreuse.
Quelques repères: savoir distinguer les polistes des autres vespidés.
La distinction avec le frelon est facile: outre la grande taille, la couleur rouge sombre du thorax et du premier anneau abdominal ne laisse aucun doute sur l'identification de ce pirate placide peu agressif dès lors que l'on respecte son intimité. Distinction plus délicate en revanche pour la guêpe commune dont la silhouette est tout de même un peu différente: couleurs et forme de la tête, pas de longues pattes flottantes pendant le vol.
Clé simplifiée de détermination des polistes français (d'après aramel.free.fr)
Petite devinette : à quel espèce appartient le poliste photographié sur son nid dans cet article et dont on voit le portrait ci-contre ?
Sa photo d'identité et le tableau proposé ci-dessus devrait vous aider
En savoir plus
Notes sur les Vespidae (2ème partie) :la biologie et la détermination des Polistes Cédric AUDIBERT
Les guêpes sociales par A. Ramel
Polistes, des sociales débutantes par "Zoom Nature"
Article Loxiafilms correspondant: "Les polistes" making of
Crédit photos: © Loxiafilms / Philippe Parolini - 2020